18/08/2024 « Nous sommes la Terre » Lorsque nous nous préoccupons du...
Lire la suite31/10/2022
Les institutions du bien des sols, partie 1 : la création de la SAFER
Dans des posts précédents, on vous a parlé de services écosystémiques et d’économie de l’environnement.
Les grands enjeux de cette économie sont bien souvent les espaces, que beaucoup de parties prenantes souhaitent s’approprier.
Au travers de cette série d’articles, on aimerait revenir sur les institutions qui régissent la distribution des terres en France, car c’est vraiment là le cœur de la thématique de terres à Terre.
Mais avant de faire le bilan actuel, il faut remonter un peu en arrière pour mieux comprendre comment nous en sommes arrivé.e.s là.
On vous résume donc la première partie du livre-enquête de Lucile Leclair ‘Hold-up sur la terre’ court et très bien écrit sur ce sujet.
En France, la loi encadre (ou encadrait) relativement strictement la vente de terres cultivables.
Clairement le système a beaucoup changé depuis le moyen-âge, où il y avait d’un côté les serfs qui cultivaient la terre et les seigneurs qui la possédaient, possédaient le fruit du travail des serfs et ne leur rétribuaient que le minimum de ce dont ils avaient besoin pour survivre.
En 1789, révolution française, le statut de seigneur est envoyé aux oubliettes et les terres sont vendues aux enchères.
Sauf que, évidemment, les serfs n’ont pas les moyens de les acheter, et dans la majeure partie des cas ce sont les bourgeois qui se les procurent.
Le deuxième chamboulement arrive grâce à l’instauration du suffrage universel masculin en 1848 qui donne donc droit de vote aux paysans hommes – pour les femmes il va falloir attendre presque un siècle, soit 1944…-.
Et là, Léon Gambetta (président de la chambre des députés), se rend bien compte qu’il y a toute une tranche de la société qui a été oubliée jusque là et qu’il va falloir convaincre aux élections : à savoir, non pas ceux qui possèdent la terre, mais ceux qui la travaillent.
Donc il crée le crédit agricole en 1880 pour que ce soit beaucoup plus facile aux paysans d’emprunter de l’argent, et à des taux d’intérêt beaucoup plus bas. C’est le vrai premier tournant pour les travailleurs de la terre.
Alors qu’au début du 19e siècle, moins d’un quart des terres en France appartiennent aux paysans, cent ans plus tard c’est plus de la moitié.
[parenthèse : c’est aussi dû à l’essor de l’industrie qui a lieu à peu près en même temps qui fait que les bourgeois se désintéressent de la terre]
La période qui suit la deuxième guerre mondiale marque le deuxième tournant en faveur des paysans. En 1942, François Tanguy-Prigent, un paysan et résistant de l’époque fonde la « confédération générale de l’agriculture », un syndicat clandestin. Rapidement il se voit nommé ministre de l’agriculture.
C’est d’ailleurs après la seconde guerre mondiale que ce ministère prend énormément d’importance.
Après que la population française a connu la faim pendant la guerre, on se rend d’autant plus compte de l’intérêt de l’autosuffisance alimentaire du pays, qui repose presque tout entier sur les épaules des paysans.
C’est ainsi qu’en 1946 la loi sur le fermage est votée. C’est le deuxième tournant qui vient en appui des travailleurs de la terre. Avec cette loi le bail fermier (la « location » de la terre) est d’une durée par défaut de 9 ans, avec reconduction automatique et le propriétaire ne peut expulser le paysan que si c’est pour travailler la terre lui-même. Au travers de cette loi, les locataires deviennent des quasi-propriétaires de la terre.
Seulement il y a encore un ‘hic’, car dans ‘quasi’, cela veut bien dire que ceux qui travaillent la terre n’en sont toujours pas les propriétaires, et que bien trop souvent, lorsqu’une terre est mise à la vente, ce sont les plus aisés qui s’en emparent.
Cela change en 1960, lorsque Edgar Pisani, ancien résistant et alors ministre de l’Agriculture, promeut une loi qui lutterait contre la spéculation foncière qui a lieu à cette époque. On assiste alors à la création des Sociétés d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural, ou “SAFER” pour les intimes chargées d’intervenir dans les ventes de terres et d’accorder la vente en priorité aux agriculteurs.
Ces sociétés existent encore aujourd’hui, et c’est par elles que doivent encore passer les propriétaires et acquéreurs de terres.
Nous verrons dans le prochain post l’évolution qu’elles ont prises et pourquoi ce sont des enjeux cruciaux quand on regarde à quoi pourrait bien ressembler les paysages français dans les décennies qui viennent.
Livre à retrouver aux éditions du Seuil, en cliquant ici.
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